mercredi 17 octobre 2018

Pourquoi ce titre : World -2.0 ?


   Les multiples scénarios dramatiques, à juste titre, émanant de non moins multiples experts, nous parlent de fortes diminutions d'approvisionnements énergétiques, voire de pénurie, de l'extinction phénoménale d'une partie vitale de la faune et de la flore, de bouleversements climatiques invivables, de futures guerres de l'eau, du pétrole, des terres arables, etc...

    Ces scénarios sont crédibles, quelque soit le délai restant avant leur réalisation. Il est évident qu'un jour, il n'y aura plus de pétrole, de gaz, de charbon, et que, sans ces énergies puissantes, il nous sera impossible d'extraire des métaux de plus en plus difficiles d'accès. La courbe inéluctablement descendante de tous ces paramètres nous force à accepter le fait qu'il arrivera un moment ou il nous faudra vivre comme, au mieux, au début du 18ème siècle. Qu'on le veuille ou non. (Encore qu'en Europe, on utilisait déjà du charbon au 11ème siècle à des fins de chauffage).

    La seule alternative à cet état de chose n'est pas l'économie, qui ne fait que retarder l'inévitable, ni la fabrication complexe et gourmande en technologies de pointes de bio-carburants et autres dérivés. Les scientifiques, eux-mêmes, ont prévenu : la solution ne viendra pas de la science. Il suffit de se représenter un terrain boisé (en admettant que le bois survivra à la pénurie d'énergie), bordé d'une rivière, dans lequel vous placer une équipe d'ingénieurs afin de construire une usine quelle qu'elle soit. Le défi est impressionnant.

    Il ne faut perdre de vue que ces changements drastiques du mode de vie des populations les plus riches en technologies et en services ne vont pas se faire dans le plus parfait ordre social. Au contraire, les états, par manque de prévoyance, se montreront incapables de continuer à faire respecter l'ordre au sein de leur population. Et aux premiers signes de danger, il faudra ajouter la désertion d'une partie des agents et militaires soucieux de regagner leurs familles, armés et prêts à se défendre. (Il est déjà difficile d'empêcher les vols, viols et meurtres à notre époque alors que nous bénéficions de toute l'énergie disponible).

     A l'issue de ce qui sera probablement une longue chute douloureuse, ce qui subsistera de l'humanité tâchera de s'organiser. Mais avec quelques handicaps de départ jusqu'ici inconnus : l'absence d'énergie facile et bon marché, un climat hostile engendrant des saisons mal connues, des métaux difficiles d'accès, des eaux polluées, une agriculture naturelle difficile à relancer sur des terres épuisées, une insécurité sociale patente, et, par dessus tout, l'absence remarquable de médicaments en quantité et qualité. Sans parler du déficit de transmission du savoir intervenant toujours en période d'instabilité sociale. Il ne sera peut-être plus possible, pour nos lointains descendants, de comprendre un panneau avertissant : Ne pas pénétrer sur la zone : réacteur nucléaire à l'arrêt.

      L'humanité ne va donc pas devoir recommencer à zéro, c'est pire que cela, elle va devoir revenir à une vie pénible, courte et sans espoir d'évolution technologique. C'est une affirmation très difficile à entendre, je le conçois aisément. C'est pourtant le seul avenir envisageable sérieusement, à moins que ET ne nous vienne en aide.

      World 1.0 = La révolution industrielle.
      World 2.0 = La révolution numérique.
      World -2.0 = Survivre à l'hostilité d'un monde épuisé et pollué.



     

jeudi 11 octobre 2018

La courbe des vertus.


11/10/2018.

       Les faits :

- Sentiment. Sans toujours être en mesure de comprendre les arguments scientifiques des uns et des autres, nous, citoyens ordinaires d'un monde offrant un accès facile à l'information, sommes conscients que notre mode de vie est en passe de se modifier d'une façon importante et dans un délai d'une génération.

- Savoir. L'accès à l'information ne nous place que dans la posture d'un observateur avisé. En aucun cas cette information ne nous donne un pouvoir quelconque sur la marche mondiale. L'amplitude limitée de nos actes  ne peut aboutir qu'à un résultat absolument indolore pour un marché articulé et alimenté autour d'une distribution mondiale.

- Réaction. L'optimisme est la défense la plus accessible à tous ceux qui n'ont aucun pouvoir sur leur propre vie sociale, c'est à dire 90 % de la population humaine. Cependant, il n'a jamais été prouvé que se dire "Tout va bien se passer" ait conduit à une résolution automatique des problèmes. 

- Conséquence. Aucune mesure sérieuse de préparation n'est mise en oeuvre. C'est le syndrome de la course à la falaise : bien que je sache pertinemment que la falaise approche, je ne peux ralentir sans me faire dépasser par mes voisins et perdre, par le fait, prestige et récompense.

       Résumé :

  Je sens, je sais que quelque chose ne va pas, mais comme je vis dans une société qui se charge de décider et de produire ce dont j'ai besoin, je fais confiance aux autorités pour trouver une solution. De plus, je ne vois pas pourquoi je serais le seul à diminuer mon confort alors que mes voisins ne font aucun effort. Enfin, si je prends le risque d'extrapoler les conséquences de tous les effondrements possibles, les drames à venir envisagés sont tels qu'aucune préparation ne me paraît satisfaisante. 

      Résultat :
  L'être humain est incapable de se projeter activement dans un avenir plus sombre que tout ce qu'il a vécu antérieurement si cet avenir semble définitif. Cette tare est appelée l'espoir. Il va donc modifier volontairement son raisonnement de façon à pouvoir se mentir et faire persister un mode de vie qui lui convienne.


        L'explication :

   Il est toujours difficile de présenter publiquement la faiblesse de l'être humain. En général, les gens se pensent bons et n'ont aucune envie d'entendre quelqu’un tenter de leur démontrer le contraire.

   Le constat populaire est le suivant : l'Homme est fondamentalement bon, du moins la majorité de l'espèce.
   
   Or il est aisé de constater que cette affirmation est tout bonnement fausse. Ce que nous nommons l'évolution sociale n'a que rarement été le fruit du travail d'un génie altruiste, désintéressé par la gloire ou la fortune. Voyons un peu ou nous en sommes :

- La particularité de quasiment tous les empires est l'expansion, par la domination ou l'anéantissement du voisin, à chaque fois que l'occasion se présente. L'Homme n'est donc que peu partageur.
- L'établissement d'une législation doit toujours être accompagné d'un système de répression obligeant tous les citoyens visés par la loi d'y obéir, de gré ou de force. Les hommes sont donc différents dans leurs idéaux.
- Les autorités d'un pays sont en permanence sous la protection d'une force armée. Le consensus populaire est inexistant et les déséquilibrés font partie de la production humaine.
- La guerre est une action dont l'efficacité des outils est portée à un maximum que n'atteint aucune des autres facettes de notre civilisation "évoluée". Il est également facile d'observer que les pays se réclamant d'une politique humaine, tolérante et moderne sont parmi les plus équipés en potentiel destructeur. La domination de l'autre reste un moteur premier dans une forte proportion de la population.
- La fabrication massive de médicaments n'est pas le résultat d'une politique gouvernementale bienveillante, mais bien de l'initiative d'individus motivés par le bénéfice personnel. Les bonnes actions sont souvent intéressées.
- La multitude d'affaires de corruption investissant toutes les structures sociales, politiques, sportives, caritatives ou événementielles, ne motive aucune réaction définitive d'amélioration des systèmes. Peu de gens accusent la fonction, il est plus facile d'accuser la personne, surtout pour ceux qui profitent amplement des avantages liés à ces fonctions. Mis a part quelques exceptions, les humains sont corruptibles.
- La difficulté pour l'humain d'appréhender tous les paramètres d'un événement systémique planétaire est telle qu'il suffit de lui présenter une ou deux causes afin d'expliquer le résultat observé ou attendu. La tendance a classer en noir ou blanc est générale, la complexité est rébarbative.
- Contrairement à une croyance fréquemment répandue, les dirigeants politiques d'une société ne font pas partie de ce que la société produit de meilleur en termes d'intelligences, de compétences et de bienveillance. La lutte en politique est âpre et n'est remportée que par ceux dont le système de valeurs permet d'écraser ou de discréditer à n'importe quel prix leurs concurrents. Il est donc présomptueux d'attendre d'eux des décisions fondées sur la sagesse et la gestion "en bon père de famille" de la nation et de ses ressources. D'autant plus que les mandats qu'ils occupent ne couvre que quelques années (d'ou la difficulté de comparer les résultats aux promesses) et qu'il n'existe aucune institution populaire compétente chargée de juger les résultats de leurs actions. Gros avantage de l'impunité post-électorale. La démocratie est garantie par des personnes éduquées à la communication et à la gestion de ce qui est, pas au bien du plus grand nombre et à la gestion de ce qui sera.
- L’enseignement porte en lui un défi irréalisable en l'état actuel de la démocratie : l'école est censée enseigner aux enfants les règles de base du comportement adéquat dans la société actuelle, ainsi que les matières susceptibles de lui fournir une place "utile" à cette même société. Les menaces certaines se profilant au gré des annonces scientifiques et des observations objectives de l'évolution mondiale devraient réorienter ces matières, en supprimer certaines et en ajouter d'autres. C'est loin d'être le cas. Le déni est une particularité première de l'esprit humain. 

Mais comment se fait-il que nous supportions un système inégalitaire et liberticide ?

C'est relativement simple à comprendre. Les autorités (chefs de clans, rois, présidents, dictateurs et autres premiers ministres) se sont succédés depuis le début de l'histoire humaine. Nous avons vu plus haut que l'attrait de ce genre de fonction ne motive pas tout le monde, d'ailleurs, la fonction elle-même n'est pas perçue de la même façon par tous. Les plus savants se montreront inquiets des multiples paramètres à tenir en compte lors de la prise de chaque décision, la difficulté d’œuvrer pour un bien majoritaire, leur propre sentiment d'imperfection les écartera du groupe des candidats. La majorité de la population, quand à elle, est convaincue, à tord ou à raison, d'être inapte, insuffisamment compétente pour garantir une gestion parfaite de la société, elle ne fera aucune démarche en vue d'obtenir ce genre de poste.
Ne restent que ceux qui, persuadés de leur supériorité, et séduits par les attraits du pouvoir, pourront se proclamer compétents, quelque soit le réel niveau de cette compétence, et entrer en lice contre leurs concurrents, des miroirs d'eux-même.

Il en résulte que, mis à part quelques incidents de parcours, les personnes portées au pouvoir ne sont nullement animées par la volonté de servir le peuple et que leur plus gros défi, une fois élu, n'est pas de travailler à la fonction, mais bien de travailler à la persistance de leur présence dans la fonction.

C'est cette volonté de persistance qui est à l'origine des textes de lois, à leurs modifications, amendements, abandons, etc...
Pour faire simple, les lois sont établies par des gens plus préoccupés à rester aux pouvoirs (il existe plusieurs formes de pouvoir, politique, militaire, culturel, ...), qu'à remplir leur fonction.

En dictature, rester au pouvoir est relativement simple, il vous faut plus de fusils que n'en a l'opposition.
En démocratie, c'est plus subtil, il faut toujours faire croire aux électeurs que vous êtes plus à même de garantir paix, sécurité et abondance que vos concurrents. Tout en se réservant la possibilité de décrédibiliser ce concurrent s'il venait à promettre un ciel encore plus serein que le vôtre. Ce travail dédié à l'apparence, à la désinformation et au combat contre l'opposition exige une énergie formidable, accessible à tout instant. Ce qui laisse très peu de place au sens réel de la fonction.

La succession de ce genre de personnage aux postes clés des états ne peut que rendre l'accès aux plus hautes fonctions quasiment impossible pour le commun des mortels. Pire, si la nomination d'un candidat non accepté par les autorités devait advenir, l'ostracisme dont il serait victime l'empêcherait d'obtenir le moindre résultat dans sa fonction, ce qui le rendrait perméable à la décrédibilisation. Il est amusant de constater que nos gouvernements populaires (qui émanent du peuple) accusent de populisme ceux qui ont une pensée différente de la leur.

L'inégalité découle des manœuvres égoïstes d'autorités indifférentes aux obligations de leurs fonctions.

Et la liberté dans tout ça ?

   Encore plus simple. La liberté est souvent décrite de la façon suivante : faire ce que l'on veut, quand on le veut.
   Mais qui, dans l'histoire humaine, à fait exactement ce qu'il voulait à tous les moments voulus ?
La satisfaction des besoins primaires de l'animal-homme (boire, manger, dormir, être en sécurité) l'oblige déjà à trouver ses sources de nourritures, à se prémunir contre les intempéries, contre les agressions d'autres humains, d'animaux, de bactéries, virus, etc...
Vous me direz "Ok, mais les rois alors ?". Réponse : bien qu'il soit plus facile pour eux d'accéder aux multiples plaisirs que peut offrir la vie aux nantis, ne pensez pas qu'ils puissent faire ce qu'ils veulent de leur temps. Ni quand ils le veulent. Tout personnage doit se soumettre à des obligations, plus ou moins pénibles à subir. Demandez à la plupart des gens, même riches, ce qui leur manque le plus, la réponse la plus courante est "Le temps, je manque de temps !".

   La liberté est un état qui ne peut être atteint que par un être dépourvu de besoin et libre de tout contrôle extérieur.

Vous avez besoin de manger ? Vous venez de perdre votre liberté.
Vous devez vous rendre aux toilettes ? Essayez donc de reporter ça à demain....
Vous désirez acquérir le dernier smartphone à la mode ? Travaillez ou volez, le fabricant ne vous le donnera pas gratuitement, sous prétexte que vous avez décidé d'être libre.
Vous voudriez vous promener dans ce bois magnifique ? Il s'agit d'une propriété privée, vous n'avez pas la liberté de pénétrer sur ces terres.

  La liberté n'est pas à confondre avec le bonheur qui, lui, est plus accessible. Le bonheur est au rendez-vous lorsque tous les besoins, primaires et secondaires, sont satisfaits. Inutile de chercher à y ajouter des dimensions métaphysiques ou religieuses, il n'y en a pas.

Vous pouvez même être amené à brider votre propre liberté :
-  refuser un emploi qui ne vous convient pas, c'est risquer de ne pas en trouver d'autre. Résultat, vous vous forcez.
- Avoir envie de critiquer, d'une façon légitime, le pouvoir en place risque de vous menez à une position inconfortable au sein de votre entourage, voire même de nuire à cet entourage. Résultat, vous vous taisez.

Le fond de ma pensée à ce sujet est clair, la liberté n'a jamais fait partie des états accessibles à l'homme. Elle a été détournée de sa définition première qui est "de ne pas être contraint par un tiers".

Donc point d'égalité ni de liberté. L'absence de fraternité découle de facto de l'inégalité.